Bonjour à tous.
Il y a quelques temps, Djoul, ma copine de Montréal, a fait des photos avec ma tenue de tango! Alors comme c'est le thème j'ai envie de lui rendre hommage! Voilà le fruit de son travail! ;-) Merci à toi Djoul pour cette photo, et les autres! ;-)
Autrement, il y a quelques semaines, Stella Jordan, la compagne de mon prof de tango (ma prof et collègue de tango quand je suivais les cours de groupe), a rédigé un texte sur le tango argentin.
Je lui ai demandé son autorisation pour le mettre ici. Car j'ai envie de vous partager ceci. C'est malgré tout une passion pour moi.
Donc voilà ce qu'elle nous a transmis en plusieurs fois.
Bonne lecture à tous. Et qui sait, peut-être aurez-vous le goût d'essayer cette belle danse! ;-)
Les bienfaits de la danse
Les bienfaits psychologiques et physiologiques de la danse, et plus particulièrement de la danse en couple, ne sont un secret pour personne.
D’abord la danse est une activité sociale amusante, où l’on rencontre des gens dans un contexte peu stressant. C’est une activité qui aide à diminuer la timidité et les inhibitions, à renforcer la confiance en soi, à évacuer le stress et la tension, ce qui augmente le niveau d’endorphine amenant une sensation de bien-être. Pendant qu’on se concentre sur le mouvement à exécuter, on oublie nos soucis et on canalise notre trop-plein d’énergie de façon positive. La danse devient aussi un moyen d’exprimer ses émotions, tout en appelant à la courtoisie, les bonnes manières et un respect de la bienséance. Elle impose une reconnaissance de l’autre. Enfin la danse est une activité conviviale ou l’âge n’entre pas en ligne de compte.
Les avantages pour la santé sont aussi nombreux. Le mouvement constant et fluide de la danse permet de développer plusieurs aspects. D’abord, la coordination du rythme et des mouvements (coordination entre le haut et le bas du corps; coordination interpersonnelle avec notre partenaire) est un exercice mental de maîtrise de son propre corps. De plus, non seulement le raffermissement des abdominaux et des fessiers procure un meilleur équilibre offrant ainsi une stabilité dans les activités quotidiennes, mais l’assouplissement et le renforcement progressif des principaux groupes musculaires procure plus de flexibilité et de tonus, se traduisant par une gestuelle quotidienne plus gracieuse et un maintien plus droit. Cet exercice d’intensité douce à modérée aide également à prévenir des troubles cardio-vasculaires en évitant le sédentarisme, et renforce les articulations et les os. En fin de compte, un des grands avantages de la danse est qu’elle permet une prise de conscience de son corps. On apprend à mieux se connaître. Selon France Schott-Billmann[1], psychanalyste et danse-thérapeute à l’université de Paris-V, « les règles de la danse sont une façon de convier le corps à la conscience de soi à travers des mouvements qui, par la façon dont ils sont construits, revisitent ses fondements aussi bien physiques que psychiques. »
Et que dire de la musique. Dans une étude sur la neuroscience de la danse[2] des chercheurs ont observé plus d’activité cérébrale lorsque l’apprentissage d’un mouvement se faisait avec la musique. Des pas de danse faits en synchronisme avec la musique génèrent plus d’influx de sang au cerveau que des pas faits sans musique. De plus, au lieu de contraindre le corps, la musique libère le mouvement qui était jusqu’alors empêché, de sorte que chacun découvre son savoir-faire naturel.
Mais alors, quels sont les avantages de danser le tango plutôt qu’une autre danse?
C’est ce que nous verrons dans les semaines à venir.
[1] Schott-Billman, Le besoin de danser, éditions Odile-Jacob, nov. 2000, Paris, p.68.
[2] Jaoabbey Sack, So You Think You Can Dance?: PET Scans Reveal Your Brain’s Inner Choreography, Scientific American Magazine, June 16, 2008. Basé sur une etude intitulée The Neuroscience of Dance.
Les caractéristiques spécifiques au Tango Argentin
Nous avons vu la semaine dernière quels sont les bienfaits de la danse de couple en général. Regardons aujourd’hui les deux caractéristiques spécifiques et assez exclusives au Tango Argentin et qui distingue le Tango de autres danses : la qualité intense de l’étreinte des partenaires, et l’improvisation.
D’abord l’étreinte dans le tango argentin requière une connexion intense et assez particulière de la part du couple, car un moment intime est créé dans cette étreinte : debout face-à-face, les épaules parallèles, et les centres de masse alignés. C’est une position qui accorde à l’autre toute notre attention, qui met l’autre au centre de notre univers. Dans son livre The Meaning of Tango, Christine Denniston explique que la qualité de l’étreinte du Tango pourrait à l’origine avoir été motivée par un besoin d’intimité inassouvi : Tango evolved in a society where loneliness and isolation were the norm, where many people were forced to live on their own, and where attention and true intimacy were rare and precious. Naturally, then, Tango dancers chose the most intimate, personal, and perhaps even emotionally challenging position possible to dance … They danced heart to heart.[1] Selon Federico Trossero, psychiatre et professeur à l’École de médecine de l’Université nationale de Rosario, et spécialiste de la tango thérapie, cette danse improvisée, de par cette étreinte particulière, permet la libre expression des sentiments et des émotions. « Le tango, à travers l’embrassade, le toucher et le mouvement, nous permet de reproduire des expériences de la première enfance et de satisfaire une part de nos besoins affectifs. »[2] Il ajoute même que « sur le plan chimique, le contact physique libère dans l’organisme des substances qui envoient une cascades d’informations au cerveau et qui peuvent modifier temporairement la production de certaines molécules comme la chromatine et la sérotonine (Holsboer, 1999). Cette dernière fonctionne à double sens; elle joue un rôle dans les changements d’état émotionnel en même temps qu’elle est influencée par eux. »[3]
De plus, le tango argentin est une danse d’improvisation. La technique du tango est basée sur une façon de marcher qui demande d’être à l’écoute de son corps et de celui de l’autre, dans l’ici et maintenant. Particulièrement importants sont les rôles complémentaires dans cette danse d’improvisation. Un homme et une femme, le guideur et la guidée, doivent être disponibles l’un à l’autre et chacun doit accepter de prendre sa propre place, d’assumer son propre rôle. Le rôle du guideur et de la guidée sont bien déterminés. L’harmonie de la danse dépend énormément de l’acceptation de son propre rôle. L’homme doit accepter de guider, sans hésitation. En vivant la réalité de chaque moment de danse et en s’adaptant à chaque mouvement de la guidée, le guideur accepte la responsabilité de l’attendu autant que de l’inattendu. De son côté, la femme doit accepter d’être guidée, de ne pas savoir où elle va. Seule la conscience et l’acceptation de son rôle donnent à la guidée la confiance nécessaire pour vivre l’instant présent sans anticipation. En effet, la guidée ne doit ni devancer la guide, même si c’est « pour faire bien », ni y résister, de peur de « ne pas faire la bonne chose ». Autant le guideur doit développer une confiance tranquille et une habileté à indiquer la guide, autant la guidée doit développer cette même confiance tranquille à ne pas bouger à moins qu’on lui guide un mouvement, et l’habileté de prendre ce mouvement et en faire le sien de façon active plutôt que passive.
Étant donné qu’il n’y a pas de chorégraphie préétablie dans le tango (il n’y a que lors de spectacles que les danseurs décident d’une chorégraphie), pour danser le tango, l’homme et la femme doivent tout à la fois développer la confiance en soi et la confiance en l’autre et apprendre à vivre le moment présent afin de se rendre disponible à prendre le risque de l’inconnu - le tout dans un esprit de générosité et de partage. Au cours de l’apprentissage, lorsque les bases fondamentales du tango, communément appelé « l’alphabet du tango» deviennent plus solides, les combinaisons multiples exécutées dans l’improvisation apportent bonheur et émerveillement aux danseurs. Le tango argentin, de par son expérience d’intimité, offre aux danseurs une occasion privilégiée et socialement acceptable d’explorer et apprendre à gérer les relations interpersonnelles dans toutes leurs complexités.
On dit du tango argentin qu’on le danse avec son cœur, car, dans un tango, lorsque la connexion devient dialogue, chaque partie du corps participe à la fluidité et à la qualité du mouvement, de même que chaque pause devient tout aussi vivante que le mouvement lui-même.
Ces caractéristiques inhérentes au tango argentin semblent depuis quelques années avoir attiré l’attention de divers chercheurs. Plusieurs recherches ont permis de placer l’apprentissage du tango argentin parmi les activités permettant de soigner ou d’améliorer la qualité de vie de certains patients atteints de maux psychologiques et physiques : certaines personnes souffrant de dépression, phobies sociales, schizophrénie, maladies cardio-vasculaires, Parkinson, Alzheimer, et également pour les personnes âgées ayant des problèmes d’équilibre, de mémoire et de coordination.
Dans les prochains Tangusto, nous verrons les bienfaits du Tango argentin sur la santé psychologique et sur la santé physique.
[1] Denniston, Christine, The Meaning of Tango, The Story of the Argentinian Dance, Portico Books, 2007, p. 31.
[2] Trossero, Federico, Réflexion sur la tango-thérapie, ses fondements, ses applications, article paru dans Tango sans frontières, sous la direction de France Joyal, Presses de l’Université du Québec, 2010, page 46.
[3] Trossero, Federico, idem, page 46.
Les bienfaits du Tango argentin sur la santé psychologique
Qu’on s’en rende compte ou pas, il semblerait que de faire quelques pas de danse dans l’étreinte étroite d’un Tango apporterait de nombreux bénéfices pour la santé mentale. Dans un article intitulé « Tango & Santé[1] », Solange Bazely répertorie diverses recherches portant sur les bienfaits psychologiques du tango argentin. Entre autre, elle note le travail du docteur et spécialiste en psychiatrie, Guillermo Hönig, de l’hôpital psychiatrique la Borda (José T. Borda Interdisciplinary Psychological Assistance Hospital). Le docteur Hönig a mis en place des ateliers à tous les quinze jours où « les malades, des hommes, en majorité schizophrènes, sont invités à prendre le cours [de tango] … Les bienfaits sont multiples, notamment grâce à l’abrazo [l’étreinte] qui permet une communication forte avec l’autre … Par ailleurs, la concentration que requiert l’apprentissage permet d’échapper, même momentanément à leurs préoccupations … Une belle façon de se reconnecter avec l’autre … ». Dans un article intitulé Tango Hospital - Ario[2], paru dans la revue de Buenos Aires La Milonga Argentina, Gabriel Cócaro présente le travail de l’équipe de danseurs à l’hôpital de la Borda. Selon le docteur Hönig, les cours stimulent l’interaction entre les patients, et permettent de créer des liens étroits avec des personnes qu’ils n’auraient jamais côtoyées autrement, puisqu’ils n’auraient pas fait partie de leur entourage. »
De plus, en apprenant un code commun à tous les danseurs de tango, les gens vivant avec une maladie perdent leur statut de patient. On cesse de les traiter comme tel parce que dans l’apprentissage de la danse, ils deviennent un égal. Selon Hönig « Notre culture considère les humains dans la souffrance comme des êtres différents. Alors, lorsqu’une personne est capable de créer des liens produits et partagés par un même code culturel (notamment le code du tango), cela met un baume sur la douleur, et ça, conclut-il, c’est thérapeutique. » L’apprentissage du tango ne prétend pas pouvoir guérir la maladie, mais chose certaine il augmentera la qualité de la vie des personnes malades en brisant l’isolement que cause toute maladie.
De son côté le psychiatre et auteur du livre Tango Terapia,[3] Federico Trossero, suggère et utilise lui-même les ateliers de tango comme traitement de la dépression, des phobies sociales, et de la schizophrénie. Il voit le tango comme catalyseur du développement personnel permettant à la personne d’explorer ses ressources intérieures, et de se prendre en main dans un espace de création et d’épanouissement. Selon lui le tango est un outil puissant, d’autant plus auprès de personnes pour qui l’expression verbale n’apporte pas les réponses et le bien-être souhaité. La musique et la danse de tango, son rythme, sa connexion avec l’autre, ses mouvements, deviennent un « instrument privilégié pour transformer l’unité bio psychosocial qu’est l’être humain »[4] Schott-Billmann ajoute qu’ « en inaugurant un nouveau rapport au corps, au plaisir, au groupe, à l’autre et à soi-même, la danse offre un regain de jeunesse, un renouvellement des valeurs et une autre identité »[5].
Nous complèterons la semaine prochaine cette série de textes sur les bienfaits du Tango argentin avec les bienfaits du tango sur la santé physique. Bonne semaine et à vendredi.
[1] Tango & Santé (Tout Tango Magazine, France), Solange Bazely, site tangoterapia.org.
[2] Tango Hospital – Ario, Gabriel Cócaro, article paru dans la revue La Milonga Argentina, no.41, julio 2009.
[3] Tango Terapia, Fundamentos, Metodología, Teorí y Práctica, Federico Trossero, 2da Edition.
[4] Site officiel du docteur Federico Trossero : www.tango-terapia.com.ar/
[5] Schott-Billmann, op. cit., p. 81.
Les bienfaits du Tango Argentin sur la santé physique
Des travaux de spécialistes en cardiologie tels le docteur Sergio Fiore, président de la Société de Cardiologie d’Entre Rios et le docteur René Favaloro, créateur du by-pass, démontrent les bienfaits du tango sur la santé physique. « La prévention étant à l’honneur en matière de cardiologie, une enquête scientifique a effectivement fait ressortir que le tango pouvait contribuer à diminuer les facteurs de risques des maladies cardiaques, en tonifiant la musculature, en améliorant la posture lombaire, l’équilibre, la stabilité et la flexibilité, en réduisant le stress et l’anxiété et en augmentant la confiance en soi et la socialisation. »[1] « Danser le tango aide à prévenir les carences physiologiques chez les adultes sains, et ralentit le processus naturel de vieillissement » expliquent Ricardo Comasco et Roberta Piedro, cardiologues, et co-auteurs du livre Le cœur dans le tango. Leurs recherches démontrent que danser le tango « permet la réduction du cholestérol total et du mauvais cholestérol (LDL), mais également d’améliorer la tolérance au glucose en empêchant le diabète de type II et en aidant à son traitement, de prévenir l’hypertension, de maintenir et d’améliorer la force, l’endurance et la masse musculaire, et de prévenir l’ostéoporose. »[2]
Chez les personnes âgées, une étude réalisée sur 30 personnes âgées entre 68 et 91 ans par l’Université McGill de Montréal, sous la direction de Patricia McKinley, révèle qu’au bout de 10 semaines de pratique du tango, les participants ont « une meilleure stimulation du système nerveux central, une plus grande activité cérébrale et une amélioration de la coordination et de l’équilibre. Le fait de danser à deux est un plus non-négligeable qui rend également attrayante cette pratique pour les personnes du 3e et du 4e âge. »[3]
Les travaux de McKinley comparaient un groupe de marcheurs au groupe de danseurs. C’est le groupe de tango qui a obtenu une meilleure amélioration non seulement de la coordination et de l’équilibre, mais aussi de la posture et des gains cognitifs. McKinley explique cette meilleure performance par le fait que « le tango incorpore les éléments qu’on retrouve dans les programmes standards de réhabilitation neurologiques : le transfert de poids avant, arrière, de côté; se tenir sur une jambe; marcher en ligne droite vers l’arrière autant que vers l’avant; allonger le pas dans toutes les directions, et tourner dans un espace restreint. »[4] On peut en conclure que Schott-Billmann a bien raison lorsqu’elle affirme que la danse populaire est « abordable à tout âge et quels que soient la constitution physique ou l’entraînement du danseur … ses règles, au lieu de la rendre plus difficile, la font accessible à tous »[5].
De plus, les chercheurs de l’University of Washington School of Medicine de St. Louis[6] ont mené une étude qui démontre les bienfaits du tango argentin pour des gens vivant avec la maladie de Parkinsons. Un groupe de dix-neuf participants a été divisé en deux sous-groupes, un groupe suivant un programme d’exercices adaptés aux personnes vivant avec le Parkinsons, un autre groupe suivant des cours de tango argentin. Les deux groupes complétaient vingt semaines de tango ou d’exercices et chaque participant était évalué avant et après les cours. Pendant chaque heure des cours de tango, différents exercices étaient proposés : des étirements, des exercices d’équilibre, et différents pas de tango. À la fin des vingt cours, les chercheurs ont pu noter chez les patients une meilleure mobilité (Timed Up and Go test) et un meilleur équilibre (Berg Balance Scale) chez les sujets ayant suivi les cours de tango argentin que chez les sujets ayant fait le programme d’exercices.
En conclusion
Les bienfaits ressentis lorsqu’on danse le tango argentin ne sont pas banals. Cette étreinte si intense inhérente au tango argentin est en effet un véritable cadeau aux danseurs. Grâce à cette particularité, le tango argentin offre aux personnes qui pratiquent cette danse le pouvoir de l’expression de soi, un moyen privilégié de communication et de contact avec l’autre, sans expression verbale, et apporte un éventail d’avantages physiologiques et psychologiques qui par ricochet améliorent la qualité de vie et aident à rendre heureux.
Ici prend fin le fruit de mes lectures sur les bienfaits du tango argentin. Alors n’attendez pas que baisse votre forme physique ou mentale; laissez-vous emporter par la magie du Tango argentin, et dansez!
Stella Jordan
[1] Tango & Santé (Tout Tango Magazine, France), Solange Bazely, site tangoterapia.org.
[2] Tel que noté dans l’article de Gabriela Maria Ensinck et traduit par Juliette Igier intitulé Pourquoi danser le tango vous aide à rester jeune.
[3] Tango & Santé (Tout Tango Magazine, France), Solange Bazely, site tangoterapia.org.
[4] Studies with Tango dancing, computer training, show ways to maintain a healthy brain in old age (Society of Neuroscience magazine – USA). L’article était sur le site :
http:/www.tangoterapia.org/index
[5] Schott-Billmann, op. cit., p. 67.
[6] Hackney M.E., Kantorovich S., Levin R., Earhart GM, Effects of tango on functional mobility in Parkinson's disease: a preliminary study, Program in Physical Therapy, Washington University School of Medicine, St. Louis, Missouri, USA, 2007.
A bientôt tout le monde.